La prévention et la promotion de la santé dans le projet régional de santé

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Prevention promotion sante
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Le projet régional de santé 2018-2022 a pour ambition de porter en transversalité la promotion de la santé, incluant la prévention dans tous les milieux et tout au long de la vie. Ce document rappelle les concepts de prévention et promotion de la santé, et montre comment le PRS les intègre de manière transversale à travers ses orientations stratégiques.

Le projet régional de santé 2018-2022 a pour ambition de porter en transversalité la promotion de la santé, incluant la prévention dans tous les milieux et tout au long de la vie. En effet, la santé de la population et les facteurs qui la déterminent représentent un vaste champ, sensible et complexe. C’est « une représentation pluridimensionnelle, qui s’écarte d’un modèle purement biomédical réduisant la santé à l’absence de maladie qui s’intéresse aux restrictions d’activités et de participation sociale, en les situant dans l’environnement de la personne »1.

Ce document a pour but dans un premier temps de revenir sur les concepts de prévention et promotion de la santé, de faciliter leur appropriation dans une politique de santé globale et dans un second temps de montrer comment le PRS2 intègre de manière transversale la prévention et la promotion de la santé à travers ses six orientations stratégiques.

Du schéma régional de prévention à la santé publique intégrée

La place de la prévention et la lutte contre les inégalités sociales de santé est donc centrale. En effet, dès 2009, la commission sur les déterminants sociaux de la santé de l’OMS affirme que « réduire les inégalités sociales de santé (ISS) et améliorer les conditions de vie des populations nécessitent d’agir sur les déterminants sociaux de la santé (facteurs sociétaux : contexte politique et économique, environnement, conditions de vie matérielles, etc…). Les inégalités sociales et territoriales de santé demeurent en France à des niveaux élevés. Elles se traduisent par un différentiel de vie à 35 ans de 6,4 ans en moyenne entre les ouvriers et les cadres supérieurs masculins. Ce même différentiel est de 3,2 ans en moyenne chez les femmes (Stratégie nationale de santé 2017). La part attribuable aux facteurs « sociaux et environnementaux » pèserait ainsi pour 80 % dans la constitution des inégalités de santé, soit directement, soit indirectement par leur influence sur les facteurs comportementaux. Pour être efficaces, les programmes de prévention doivent donc viser à la fois les individus par l’amélioration des connaissances, des habiletés mais également les communautés et leurs environnements.

Cette approche globale a été investie depuis 2011 par l’ARS, avec le développement d’une prévention de proximité et d’éducation pour la santé, la mobilisation pour réduire les inégalités sociales et environnementales, l’intégration des acteurs du soin et de l’accompagnement médico-social, la consolidation des opérateurs ressources en prévention. Cependant, l’évaluation du PRS1 montre que si d’avantage d’acteurs font plus de prévention, l’impact sur les déterminants de santé et sur les comportements est encore peu visible du fait de la cinétique longue des politiques mises en place. Par ailleurs, le cloisonnement du PRS1 en trois schémas distincts : prévention, organisation des soins, organisation médico-sociale n’a pas permis de construire une véritable politique transversale partagée par l’ensemble des acteurs extérieurs et intérieurs au système de santé.

Le PRS2 entend dépasser ce cloisonnement pour aller vers une approche de santé publique intégrée qui consiste à susciter et coordonner les politiques publiques favorables à la santé.

Une compréhension partagée des concepts et définitions de la santé, prévention et promotion de la santé

La santé

La santé se définit comme la mesure dans laquelle un groupe ou un individu peut, d’une part, réaliser ses ambitions et d’autre part, évoluer avec le milieu ou s’adapter à celui-ci. La santé est donc perçue comme une ressource de la vie quotidienne, et non comme le but de la vie ; c'est un concept positif mettant l'accent sur les ressources sociales personnelles et sur les ressources physiques2.

La prévention

La prévention a traditionnellement été définie par l'Organisation Mondiale de la Santé comme l’ensemble des mesures prises pour éviter la survenue d’un accident ou d’une maladie. Il en est résulté une classification, en trois parties :

  • la prévention primaire qui vise à réduire l'incidence d'une maladie

  • la prévention secondaire qui cherche à révéler l’atteinte pour prévenir l’aggravation de la maladie, par des soins précoces (par exemple le dépistage)

  • la prévention tertiaire qui vise à éviter les rechutes ou les complications : elle consiste en une réadaptation à la situation créée par la maladie ou ses séquelles

Cette distinction pratique correspond à une période où les maladies infectieuses étaient dominantes. Toujours prescrite, extérieure à l'individu et au groupe, la prévention se situe alors par rapport aux stades de la maladie et donc aux soins, ce qui en limite forcément l'impact, et n'est plus adaptée aux pathologies chroniques qui font l'essentiel de l'activité médicale aujourd'hui.

Des propositions ont été faites pour une approche de la prévention qui tienne plus compte de la population et de l'implication nécessaire de l'individu ou du groupe dans la gestion de sa santé :

  • Prévention universelle destinée à l'ensemble de la population (sécurité sanitaire, promotion de la santé, éducation pour la santé…)

  • Prévention sélective ou prévention orientée vers des sous-groupes en fonction des risques spécifiques auxquels ils sont exposés (veille et alertes sanitaires, vaccination, dépistage de pathologies)

  • Prévention indiquée ou ciblée pour les patients ou personnes en perte d'autonomie (éducation thérapeutique, association soins/prévention)

La prévention se définit alors « non seulement comme l'ensemble des mesures prises pour éviter la survenue d’un accident ou d’une maladie, mais c'est aussi tout ce que font un individu ou un groupe, informés et responsabilisés, en faveur du maintien ou de l’amélioration de leur santé »3.

La promotion de la santé

La promotion de la santé est le processus qui permet aux populations d’améliorer leur propre santé en leur donnant les moyens d’un plus grand contrôle sur celle-ci2.

La promotion de la santé s’organise en un certain nombre d’axes stratégiques susceptibles de permettre aux personnes et aux groupes d’améliorer leur santé :

  • Des politiques qui agissent en faveur de la santé (fiscalité, organisation des services…)

  • Des environnements favorables à la santé (environnement physique, conditions de travail, école, quartier…)

  • Le renforcement de l’action communautaire par la possibilité pour les individus et les groupes de participer aux décisions

  • L’acquisition d’aptitudes individuelles par la formation, l’éducation pour la santé

  • La réorientation des services de santé par la prise en compte de l’expression des personnes et des groupes, la participation à la prévention et à l’éducation à la santé, le partenariat avec d’autres acteurs du champ associatif, éducatif, social, scolaire….

Les déterminants de la santé

La promotion de la santé vise donc à agir sur plusieurs déterminants de la santé :

  • déterminants personnels : ressources physiques, psychologiques et sociales, habitudes de vie ayant un rapport avec la santé (alimentation, tabac, alcool, activité physique…)

  • déterminants environnementaux : qualité de l'air et de l'eau, habitat, transports, urbanisme, hygiène collective, conditions de travail

  • déterminants sociaux-économiques : niveau d'éducation, insertion sociale et support social, milieu culturel, accès aux services publics, niveau de revenu, statut professionnel

  • déterminants liés au système de santé : accès aux soins, sécurité des soins, accès au progrès technique

La promotion de la santé s'appuie sur une conception positive et globale de la santé, comme un état de bien-être physique, psychologique et social. Elle relève pour partie de l'action de nombreuses institutions partenaires de l'ARS (protection maternelle et infantile, santé scolaire et universitaire, santé au travail etc.). Elle utilise des méthodes d'intervention fondées sur la participation des personnes et des groupes, sur l'implication de communautés et sur la mobilisation des ressources présentes sur chaque territoire.

Universalisme proportionné

Ce concept a été défini par Sir Michael Marmot dans le rapport établi à la demande du Ministère de la santé britannique en 2010 : « Une société juste, des vies en santé : un rapport critique et stratégique sur les inégalités de santé ». Il dit : « Viser exclusivement les plus défavorisés ne réduira pas suffisamment les inégalités de santé. Pour aplanir la pente du gradient social, les actions doivent être universelles mais avec une ampleur et une intensité proportionnelles au niveau de la défaveur sociale. C’est ce que nous appelons l’universalisme proportionné ».

L’universalisme proportionné (ou les mesures universelles proportionnées) consiste à combiner l’approche universelle et l’approche ciblée.

Cela implique :

  • d’offrir une intervention à tous mais avec des modalités ou une intensité qui varient selon les besoins : c’est le principe de proportionnalité ;

  • de mettre en œuvre des actions de prévention universelles ou de promotion de la santé qui s’adressent à l’ensemble de la population : c’est le principe d’universalisme.

L’éducation pour la santé

L’éducation pour la santé est un processus créant avec les personnes et les groupes les conditions de développement de leurs capacités vis à vis de la santé, valorisant leur autonomie et leur responsabilité. Il s’agit de l’éducation « pour » la santé de la personne ou de la population elle-même, telle que celle-ci la conçoit et telle qu’elle choisit de la construire, et non pas seulement telle que la projettent les professionnels ou les autorités extérieures.

L’éducation pour la santé considère la personne ou la population comme acteur de son projet de santé. Elle implique, au-delà d’une information, une formation, le développement de l’expérience personnelle, des compétences et de la capacité de jugement face aux facteurs du bien-être ou du risque. En effet, l’éducation pour la santé n’est pas une affaire de simple information sur les risques. Au-delà des conditions d’hygiène, l’éducation pour la santé des individus ne peut se faire sans leur participation. C’est pourquoi, elle engage un travail sur :

  • les représentations individuelles et sociales,

  • les attitudes face au risque et au bien-être,

  • les réactions personnelles, rationnelles et irrationnelles.

Composante de la promotion de la santé, l’éducation pour la santé met en œuvre une démarche pédagogique qui implique les sujets. Elle renforce leur capacité à prendre des décisions concernant leur santé, aboutissant à adapter leurs comportements comme leur environnement.

La réduction des risques et des dommages (RDRD)

Développée au cours des années 1980, dans le contexte de l’épidémie de VIH chez les usagers injecteurs d’héroïne, la RDRD a progressivement intégré d’autres registres d’action concernant d’autres produits notamment la consommation de substances psychoactives. La réduction des risques se réclame d’une démarche de santé publique pragmatique en ce qu’elle entend limiter les risques liés à la consommation, sans nécessairement avoir comme premier objectif le sevrage et l’abstinence.

Une déclinaison intégrée de la prévention et la promotion de la santé dans le schéma régional de santé

La politique de prévention et de promotion de santé de l’Agence régionale de santé s’inscrit dans les six orientations stratégiques en cohérence avec les cinq axes de la promotion de la santé cités dans la Charte d’Ottawa.

Ainsi, pour chaque orientation stratégique, seront rattachés des objectifs opérationnels promouvant la santé dans le parcours de vie des personnes :

Orientation stratégique 1 : Le citoyen, l’usager, acteur de sa santé et de son parcours de santé :

Il s’agira de renforcer le pouvoir d’agir des personnes par l’éducation à la santé en favorisant le déploiement des actions probantes en prévention. Parmi celles-ci les actions précoces dès le plus jeune âge et le renforcement des compétences psychosociales chez les jeunes : avoir une pensée critique, être habile dans les relations interpersonnelles, avoir conscience de soi, savoir gérer ses émotions… La littérature scientifique montre l’efficacité des interventions visant à renforcer ces compétences dans l’enfance pour diminuer les conduites à risques (conduites addictives, problèmes de santé mentale). De même, il s’agira de renforcer le pouvoir d’agir des usagers du système de santé par le développement de l’éducation thérapeutique du patient, notamment chez les professionnels libéraux.

Orientation stratégique 2 : La santé dans toutes les politiques favorisant la réduction des inégalités de santé

Il s’agira de développer une approche participative et globale de la promotion de la santé dans les territoires de proximité, à promouvoir l’évaluation de l’impact en santé des politiques publiques, à soutenir l’engagement en prévention des professionnels du soin de 1er recours, de l’accompagnement médico-social et des établissements de santé, à lutter contre les inégalités sociales de santé en agissant aux périodes clés de la vie. Une attention particulière sera notamment portée au bien-être mental et à la santé des enfants et des jeunes, au bien être affectif et sexuel ainsi qu’à la prévention des addictions dans leur globalité. Enfin, l’ARS et ses partenaires s’attacheront à promouvoir des environnements favorables à la santé en déclinant des plans ambitieux dans les domaines du sport-santé, de la santé au travail, de la santé-environnementale.

Orientation stratégique 3 : Promouvoir collectivement l’autonomie dans une société inclusive

Il s’agira de faciliter réellement l’accès à la scolarisation et à l’emploi des personnes en situation de handicap par un accompagnement adapté. La promotion du bien vieillir et de la prévention de la perte d’autonomie liée à l’âge constituent également un défi majeur face aux enjeux épidémiologiques et démographiques. Les enjeux de prévention seront également intégrés dans l’amélioration du parcours des personnes vivant avec un handicap ou un trouble psychique, ainsi que dans le développement des services « d’aller vers » les populations en fragilité sociale.

Orientation stratégique 4 : Accéder aux soins et aux accompagnements utiles et adaptés au bon moment et au bon endroit

Il s’agira de favoriser l’accès précoce au dépistage et au diagnostic de pathologies prioritaires ( par exemple les cancers, les troubles de l’apprentissage, l’autisme, l’insuffisance rénale chronique ou les maladies neurodégénératives), pour améliorer l’accès aux soins préventifs et à l’éducation à la santé des personnes en situation de handicap ou bien pour adapter le système de santé aux situations sanitaires exceptionnelles en favorisant le développement de coopérations inter établissements et en resserrant la coordination avec les préfectures.

Orientation stratégique 5 : Des acteurs coordonnés sur les territoires pour mettre fin au parcours d’obstacle

Il s’agira de favoriser la connaissance de l’offre en santé dont la prévention (en faisant mieux connaître les outils cartographiques OSCARS et CART’ETP pour rendre plus lisible l’offre de prévention et d’éducation thérapeutique du patient), accompagner le développement de l’exercice pluri professionnel coordonné sur les territoires en poursuivant le déploiement des maisons de santé et des équipes de soins primaires ou ces centres de santé pluri professionnels en soutenant leur rôle dans la prévention et la promotion de la santé.

Orientation stratégique 6 : Développer une stratégie de l’innovation

Il s’agira de développer une stratégie de l’innovation intégrant la prévention avec pour objectif d’accompagner les professionnels vers de nouvelles pratiques, de nouveaux outils ou organisations, et d’inscrire des axes innovations dans les appels à candidature ou appels à projet lancés par l’Agence à la main des acteurs. Une importance particulière sera portée sur l’évaluation de l’impact de ces expérimentations, afin qu’elles ne creusent pas les inégalités sociales de santé, et en vérifiant les conditions de leur généralisation.

Charte Ottawa Promotiion Sante

 

  • Synthèse des réflexions conduites en commission spécialisée de la prévention de la CRSA.
  • Utilisation de documents sources et bibliographie

Elaboration des PRS – Eléments méthodologiques Juillet 2010. ARS

2  Charte d'Ottawa, 21 novembre 1986

3 Pr San Marco, Christine Ferron, « Agences Régionales de santé. Promotion, prévention et programmes de santé », INPES, novembre 2009

Site internet de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives

Aller plus loin

Les livrets du PRS

Ce livret du PRS fait partie de la collection de documents constitutifs du Projet Régional de santé 2018-2022 (PRS).

Il constitue l’un des documents d’évaluation des besoins de prévention du PRS.

Il reflète les travaux conduits en 2016 et 2017 par l’agence régionale de santé avec ses partenaires sur les enjeux de prévention et de promotion de la santé de la région.

Il trace les perspectives d’évolution dans une vision prospective à 10 ans et sa traduction opérationnelle à cinq ans.